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Etre ou ne pas être... gavatx !

Frontière 1258Le terme gavatx1, aujourd’hui amical, est généreusement réservé, dans les Pyrénées Orientales, aux voisins audois. Si l’on n’y prend garde, l’habitude, cette seconde nature, peut conduire chacun d’entre nous à donner à ce terme un contenu inexact à bien des égards.

Précisons, déjà, que les habitants des Fenouillèdes, partie Nord-Ouest du département, ont eux aussi, bien souvent droit à ce qualificatif. Serait-ce parce que leur vocabulaire est riche de mots occitans alors que l’on parle Catalan dans le reste du département ? Pas si sûr !

Croire que l'on pourrait, de la sorte, circonscrire le territoire des uns et des autres serait trop simple même si l’on rapporte, pour l’anecdote, que voici plusieurs décennies, à une époque où les moyens de communications n'étaient pas ce qu'ils sont, certains Roussillonnais des lieux les plus reculés pensaient qu’il existait deux catégories de gens au monde : les Catalans et les Gavatx !

En fait, qu’en est-il ?

Des écrits2 nous précisent que, parmi les habitants qui peuplaient les contrées septentrionales de la province Narbonnaise, les gabales, habitants du Gévaudan, paraissaient être les moins éduqués et que, sous l’appellation populaire de «gavaches», ils avaient acquis, auprès des populations méridionales, la réputation d’hommes rustres. On souriait en les entendant parler, on se moquait d’eux.

Jean-Augustin Dalle, auteur d’ouvrages sur la Lozère3, précise que l’appellation « Gavach » se serait, par la suite, répandue et, qu’ainsi, dans les temps anciens, du nord de l’Espagne jusqu’aux frontières de l’Occitanie historique, les habitants d’une région attribuaient ce qualificatif à tous ceux qui demeuraient plus au nord et parlaient une langue un peu différente. Ainsi, pour les Bordelais, ce sont les Saintongeois qui sont des «gavatches», dans l’Agenais, ce sont les Périgourdins, dans le Toulousain, les Quercynois. Plus près de chez nous, dans l’Hérault, ce sont, non seulement les Lozériens que l’on traite de «gavatches», mais aussi les Aveyronnais et, particulièrement, les habitants du Haut-Languedoc. Pour les habitants de l’Aude et de Béziers, ce sont ceux qui viennent du Tarn.

La géographie fournit d’autres éléments comme l’existence, au dessus de Lodève, au pied de la côte de l’Escalette, d’un lieu-dit : « Pas des Gavatches » considéré comme frontière entre les habitants de l’Hérault et ceux du nord matérialisant, ainsi, les limites du pays bas et du pays haut. Dans le massif des Madres, le col des Gavaches ouvre un passage vers le Roussillon pour les montagnards Cerdans. Bien plus à l’Est, les Alpes de Haute Provence et les Hautes-Alpes sont des départements compris dans le pays Gavot où l’Occitan vernaculaire est le provençal-alpin.

D’autres exemples peuvent démontrer à quel point les limites du pays « Gavatx » sont fluctuantes. En Aragon les « gavachos »sont les habitants des Pyrénées, ceux qui habitent le pays des Gaves et au-delà. Ajoutons, que le terme paraît avoir traversé l’Atlantique puisque, au Mexique, il serait utilisé pour désigner les nord-américains.

Quoi qu’il en soit, le terme de « Gavatx » est très ancien. Déjà, au Vème siècle de notre ère, l’évêque de Clermont-Ferrand, Sidoine Apollinaire, exilé quelques temps à Llivia, donne dans ses lettres de nombreux et précieux détails sur les coutumes et mœurs de l’époque. Il, nous apprend que, déjà, à cette époque, les hommes des contreforts sud du Massif Central quittaient leur pays en période hivernale pour aller travailler dans le Bas-Languedoc où, appelés « Gabachos,» il leur était confié l’exécution des travaux pénibles et ingrats.

On peut ajouter qu’il en fût de même pour les immigrants roussillonnais et languedociens qui, au 16ème et 17ème siècle, fuyant les guerres civiles ou religieuses, partirent travailler au sud des Pyrénées où ils prirent le nom de « gavatxos.»

Ceci dit, pourquoi ce terme ?

Chacun s’accorde à dire qu’il dérive d’une racine romane « gaba » qui signifie « ravin, pente » et par extension «gosier, gorge». Pour certains, le goitre, affection due à une carence iodée, étant plus répandu, à l’époque, dans les zones montagneuses qu’en bord de mer, la maladie et la transformation physique des hommes qui en étaient atteints seraient à l’origine de l’expression gavatx dés lors péjorative. Pour d’autres, ce serait, plus simplement, le parler des gens de la montagne plus guttural que celui des gens des plaines bordant la Méditerranée. Au cours des âges, ces hommes et ces femmes ont su tirer partie de leur situation de moqués et de dominés pour réussir leur vie là ou le destin les a fixés.

Henry MAS

Notes:

  1. Gavatx est l'orthographe retenue dans le dictionnaire Occitan-Français (Institut d'études occitanes –Section du Tarn) de Christian Laux qui en donne la définition suivante : montagnard .
  2. Les gavaches : Michel Maldinier- Centre de Recherches du Patrimoine de Rieumontagné-
  3. Jean-Augustin Dalle : Lozère et Lozériens d’autrefois. Glanes d’histoire et de légende.

 
Avec l'aimable autorisation du Centre de Recherches du Patrimoine de Rieumontagné - 81320 Nages - pour la partie documentaire le concernant.

Lien : http://rieumontagne.free.fr/crprsite/

Remerciements: Le Pari du lac remercie chaleureusement Monsieur Mas pour avoir accepté de nous faire partager ses recherches sur ce mot de gavatx, qui nous concerne tant.