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François Bria, curé de Caramany

Ces informations et les larges extraits qui les accompagnent sont tirés de la "Notice biographique de l’abbé François Bria–Camo (1804–1876)" publiée en 1992 dans la revue Conflent sous la signature de l’historien Monsieur Roland Serres–Bria. 

Nous adressons tous nos remerciements à Monsieur Roland Serres–Bria qui nous a très aimablement autorisés à utiliser et à reproduire ses écrits dans la rubrique Histoire de notre site.

"L’abbé Bria était originaire de Thuir où s’était marié et fixé, en 1699, son arrière grand-père François Bria-Vidal. Il était le fils de Sébastien Bria-Marill, maréchal-ferrant, et de Raphaëlle Camo-Roca, native de Saint Féliu d’avall. Il naquit le 17 mai 1804 dans la maison familiale et son acte de naissance mentionne qu’il s’agit du septième jour du mois de floréal, l’an douze de la république française.
Lorsqu’il fut en âge de recevoir quelque instruction, le jeune François prit le chemin de l’école car, bien que modeste, sa famille avait pour tradition de faire instruire les garçons. En vue de faire sa première communion, il suivit aussi les cours de catéchisme.
Devenu jeune homme, François Bria ne reprit point la profession de son père, contrairement à l’usage familial, pas plus qu’il ne songea à fonder une famille. Fort de ses dispositions intellectuelles, mais surtout parce que se sentant appelé au service de Dieu, il choisit alors de lui consacrer sa vie comme prêtre séculier. Sa lignée dont il était le seul représentant mâle, (il avait cinq sœurs), allait donc s’éteindre avec lui.
Après des études préparatoires à la réception du sacerdoce au séminaire de Perpignan, il fut ordonné prêtre en 1827 et nommé à Ille le 1er juillet de cette même année."

imgp3379eglise.jpg«Il y cessa ses fonctions sacerdotales le 28 juillet 1830, nommé à Caramany, petit village des Fenouillèdes comptant alors quelque cinq cents habitants, en remplacement de l’abbé Pagès décédé le 16 avril précédent. Il prit possession de sa nouvelle paroisse, mais comme curé cette fois, le 5 août suivant. Pour l’occasion et selon une habitude dont il ne se départit jamais, il prononça une allocution basée sur " l’instruction, l’amour et la correction" dus par le prêtre à ses paroissiens. Il termina son propos en leur déclarant : "Je puis vous protester, mes frères, que ce ne sont ni des motifs d’intérêt ni des vues terrestres qui m’ont fait accepter ce poste offert par mes supérieurs, je n’ai obéi que pour vivre au milieu de vous et de me sauver avec vous. Vos peines seront les miennes, votre joie sera ma joie, vos intérêts seront les miens. Sanctifions nous tous, c’est là notre principale affaire…"
Construit au XVIIIème siècle, le presbytère de la paroisse avait vraiment fière allure avec sa tour pigeonnier veillant sur sa porte d’accès. Mais, par la faute des uns et des autres, cet édifice curial avait connu bien des avatars l’ayant détourné de sa destination primitive au profit de la commune qui y avait installé la mairie. Cet état de fait obligeait le curé à loger ailleurs.

En 1839, ce dernier quitta Caramany pour Estagel, où il ne demeura pas longtemps en raison de l’attitude peu amicale de ses habitants, dont l’abbé Bria nous explique l’origine par ces quelques lignes écrites dans son sermonnaire : "Placé par Monseigneur de Saunhac à ce poste en mars 1839, venant de Caramany qui était en procès avec cette commune au sujet de l’arrosage, un mauvais sujet de Caramany déchaîna un polisson d’Estagel contre moi ; il me représenta comme très hostile aux intérêts de cette dernière paroisse, ce qui fut cause que je fus reçu très froidement ; on alla même jusqu’à me chansonner, notamment le jour du passage du Duc d’Orléans…"
Ayant alors sollicité de reprendre sa cure précédente, l’évêque fit droit à sa demande. Mais avant de quitter Estagel son éphémère curé profita de ses adieux à la paroisse pour faire un sermon de huit pages sur la prévention et ses conséquences, le conclut par des paroles de pardon, d’excuses et la recommandation de prier les uns pour les autres pour le salut de tous.

Ce fut donc à Caramany qu’il revint le 19 janvier 1840. Il y a tout lieu de croire que ses habitants furent agréablement surpris de revoir dans leurs murs un prêtre qu’ils avaient eu l’occasion d’apprécier, neuf années durant. Désirant vraisemblablement remédier à la situation qui le contraignait à louer une maison pour pouvoir se loger, le desservant s’était tout d’abord adressé à son évêque, en février, puis, le 9 mars 1840, au préfet qui, dès le lendemain, fit part de cette pétition à Mgr de Saunhac-Belcastel, l’assurant de son appui. Comme nous le constaterons plus loin, le problème ne fut point résolu dans l’immédiat…
Au cours des neuf nouvelles années passées à la tête de son ancienne paroisse l’abbé Bria entreprit certains travaux alors jugés nécessaires. Il s’occupa d’abord de l’agrandissement du cimetière devenu trop exigu en raison de la croissance démographique, 561 habitants en 1841, et en fit clôturer l’extension. Sa bénédiction lui fut donnée en présence de plusieurs ecclésiastiques et de la population le jour de l’ascension 1841 et y fut chantée une absoute générale. Mais auparavant, le curé s’adressa aux Carmagnols pour leur parler de ce "lieu saint, consacré depuis mille ans à la sépulture des chrétiens", prenant pour thème le verset connu de la Genèse : "Souviens toi, ô homme, que tu es poussière et que tu retourneras en poussière."

L’église Saint Etienne de Caramany n’avait point de clocher digne de ce nom. Peut-être était-ce dû à ce qu’elle n’était, à l’origine qu’une simple chapelle, celle du château voisin. Pour combler cette lacune, l’abbé Bria se mit à l’ouvrage, se muant pour la circonstance en architecte et en maître d’œuvre, ce qui atteste ses nombreux talents. Fabrique et municipalité ayant décidé d’ériger un clocher-tour sur le côté droit du chevet, on se mit au travail dès janvier 1845. Mais la rigueur de l’hiver d’une part et, les entraves suscitées par une administration ennemie du progrès, d’autre part, arrêtèrent bientôt les travaux, alors que la base de l’édifice s’élevait à la hauteur d’un mètre…
Un moment stoppée, l’édification du clocher avait repris fin août. A la fin du mois de septembre suivant, la construction arrivait au niveau de la corniche supérieure, c'est dire si l’on avait mis les bouchées doubles. Interrompus en raison de l’hiver, les travaux de reprendre de plus belle en mai 1848 pour s’achever au 15 juin suivant. Le 13 juillet, mise en place de l’horloge. Les habitants de Caramany avaient prêté leur concours : les maçons Pierre et Martin Calvet, Thomas Barilles et Pierre Saly travaillant au corps de l’édifice, les particuliers fournissant manœuvres et matériaux. Tout s’était effectué sous le contrôle vigilant de l’abbé Bria qui suscitait et encourageait les bonnes volontés, secondé en cela par François Foussat. Aussi, rapportant par le menu l’entreprise, le Registre communal des délibérations rend-il hommage à son promoteur, déclarant que tous les paroissiens, pris d’affection, garderont à jamais la mémoire des bienfaits que ce digne et bon pasteur leur a rendus et leur rend toujours quand l’occasion se présente. En dépit de l’opposition sourde de quelques malveillants qui furent et seront toujours les ennemis des gens de bien, l’œuvre entreprise avait été menée à terme et, avec l’aide de Dieu sans accident. En présence de la municipalité et des habitants, le clocher fut enfin béni le 3 août 1848 par l’abbé Bria lui-même, le jour de Saint Etienne, patron de la paroisse après vêpres au cours desquelles fut chanté un vibrant Te Deum.

clocher_2.jpgDisons maintenant un mot de ce fameux clocher de Caramany qui ne laisse pas de surprendre les visiteurs par l’originalité et l’élégance de son architecture. Il consiste en une haute tour quadrangulaire à trois éléments au sommet de laquelle repose une harmonieuse superposition de trois gracieuses arcades au style orientalisant abritant trois cloches. Le parapet de la plate-forme terminale est curieusement incurvé vers le bas et orné aux quatre coins d’une boule de pierre identique à celle servant de support à la croix du pinacle. Unique en son genre dans le département, ce clocher fait l’orgueil des Carmagnols…

Dans le courant de l’année, le curé avait eu des ennuis de santé comme le révèle sa lettre écrite à l’abbé d’Aldéguier, vicaire général du diocèse. "Depuis le premier janvier 1848, lui disait-il, je ne fais plus le service de Bélesta comme je le faisais antérieurement parce que ma santé ne me le permet pas ; cependant je me suis rendu à cette annexe toutes les fois que ma présence y a été nécessaire soit pour l’administration des malades soit pour faire des sépultures, ce qui malheureusement n’est arrivé que trop souvent pendant l’été dernier car la petite vérole y exerçait des ravages ce qui, par parenthèse m’empêcha d’aller aux eaux dans la belle saison ; mais ma santé s’étant par suite dérangée, je fus contraint d’aller aux bains au commencement d’octobre."
Donnant un bel exemple de piété filiale, l’abbé Bria avait recueilli ses vieux parents, les logeant avec lui. Le 16 novembre 1848, il eut la tristesse de perdre son père Sébastien Bria-Marill, âgé de soixante dix-huit ans, dont les obsèques furent célébrées le surlendemain par l’abbé Rabixo, curé –doyen de Latour de France. Signé de ce dernier, l’acte de décès précise que le défunt décéda à trois heures du soir dans la maison de François Bria, son fils, détail indiquant clairement que la question du presbytère n’était toujours point réglé à cette date. »

Le curé de Caramany quitta à regret cette paroisse, où il avait exercé son ministère durant dix huit années en tout, pour celle de Sournia qui avait porté en terre son curé Isidore Sarda, le 10 avril 1849. Son installation comme doyen y eut lieu le 29 août suivant, en présence de l’abbé François Roca, archiprêtre de Prades.
Le 23 décembre 1852, il eut la douleur de perdre sa mère Raphaëlle Bria-Camo, décédée à quatre heures trente du matin au presbytère, à l’âge de quatre-vingts ans.
En 1855, alors qu’il était âgé de cinquante et un ans, l’évêque Mgr Gerbet, dont il avait l’estime, lui attribua l’archiprêtré de Céret, faisant ainsi le choix d’un ecclésiastique chevronné, ayant déjà fait ses preuves, mais aussi capable grâce à sa compétence d’occuper un poste plus important. Il en prit possession le 4 mars 1855 et prononça selon son habitude une allocution de circonstance.
signaturebria.jpgAu cours du premier semestre de l’année 1862, un événement imprévu combla de joie son cœur de prêtre ; il allait enfin pouvoir visiter la Ville Eternelle. Il accompagna en effet Mgr Gerbet à Rome et assista à l’audience donnée en la chapelle Sixtine par Pie IX. En ce moment particulièrement émouvant, le souverain pontife accorda par délégation sa bénédiction à l’intention de la paroisse de Céret, grâce insigne et inouïe jusqu’à ce jour.
Ce fut à Saint Ferréol qu’il aimait tant que mourut l’abbé François Bria- Camo, le 16 août 1876. Les circonstances de sa fin ne sont pas connues. Célébrées le lendemain 17 août, les funérailles rassemblèrent clergé, religieux et fidèles. Le vieux curé d’Arles présida la cérémonie. Le doyen de Latour de France, l’abbé Tolra de Bordas, et le curé d’Amélie les bains conduisirent le deuil. Une trentaine d’ecclésiastiques précédaient le corbillard. Parmi l’assistance se remarquaient les religieuses de la Salle d’asile, celles du Saint Sacrement, les membres de la société de Saint Pierre, les Pères Capucins…Tenaient le cordon, le sous-préfet, le procureur de la république, le receveur de l’enregistrement et M Charles Sabaté, directeur du pensionnat de garçons. Ce fut le premier vicaire qui prononça l’homélie, l’abbé Tolra qui procéda aux remerciements. L’abbé François Bria-Camo fut inhumé, par déférence, dans la tombe d’une honorable famille de Céret, à l’ombre bénite du monastère des Capucins pour lesquels il avait été si dévoué et si généreux.
Le 20 août suivant, la semaine religieuse du diocèse lui consacra une notice nécrologique de trois pages.

Pour conclure cette biographie, on ne peut mieux faire que de reproduire, maintenant ses dernières lignes :" Et la foule s’est écoulée, emportant au fond de son cœur le souvenir du prêtre modeste qui fut son père et son pasteur et dont l’âme purifiée par tant de labeurs et de souffrances et ornée de tant de vertus, a sans doute reçu au ciel sa récompense et sa couronne."