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1790: De consul à officier municipal

Ouverture de états généraux1789 : En convoquant les Etats Généraux à Versailles pour essayer de faire face à la grave crise économique qui affectait son royaume, Louis XVI ne se doutait pas des graves événements que cette réunion des trois ordres (noblesse, clergé et tiers-état) allait déclencher. Lui même, Roi de France et de Navarre par la grâce de Dieu, héritier du grand Louis XIV, allait se retrouver trois ans plus tard écroué à la prison du Temple sous le nom de Louis Capet , avant de subir la peine capitale. La révolution était en marche.

Faisons un petit retour dans le passé.

Le 5 mai 1789, le premier ministre Necker ouvre les états généraux sous la présidence du Roi et en présence de toute la famille royale.

A Caramaing, le 10 mai, l’assemblée des principaux habitants (il s’agit des chefs de famille âgés de vingt cinq ans et compris dans le rôle des impositions1) se réunit sous la présidence de Paul Pujol, premier consul, pour proposer comme chaque année, à Monseigneur le Comte une liste de notables dans laquelle il choisira les nouveaux premier et deuxième consuls.

(Voir en illustration l’original et sa réécriture en fin d’article)

Ces consuls étaient les représentants de la communauté vis à vis du comte et par voie de conséquence ses interlocuteurs privilégiés ; inversement, ils avaient aussi un rôle d’administrateurs du village au nom du comte. Le consulat était une institution ancienne qui s’était développée à partir du XIIème siècle et qui était très répandue en Provence et Languedoc. Les consuls de Toulouse, par exemple étaient connus sous le nom de capitouls. A Caramany, une copie d’un recensement de 1594, donc sous le règne d’Henri IV, conservée à la mairie, nous apprend que les consuls se nommaient, cette année là, Guilhaume Viguier et Jean Joulia ; le baile2 (représentant des intérêts du seigneur et  collecteur d’impôts) étant jean Fabre.

Délibération des consulsDe 1788 à 1789, Paul Pujol a donc assuré la charge de premier consul, le second, absent à la réunion du 10 mai, était Jean Sabineu. Dans la délibération, on peut noter qu’une ligne est restée en blanc pour noter le nom des nouveaux consuls choisis : elle n’a jamais été remplie et il y a des chances que nous ne sachions jamais si c’est un des premiers effets de la révolution ou un simple oubli de la part du greffier. En tout cas les délibérations suivantes nous permettent de dire que le comte a suivi les propositions de ses sujets et a choisi le premier de chaque liste, Michel Delonca comme premier consul et François Bedos comme deuxième consul. Il semblerait que ce soit sa signature qui figure dans la marge en date du 17 mai 1789 où l’on peut déchiffrer Savary.

Tandis qu’à Caramaing les choses se déroulent selon la tradition, à Paris les événements s’accélèrent.>

14 juillet : les Parisiens prennent la Bastille.

4 août : les députés du Tiers–Etat, qui se sont constitués en assemblée décisionnaire, l’Assemblée Nationale, abolissent les privilèges des seigneurs.

14 décembre : par décret, l’Assemblée Nationale crée les communes et ordonne l’installation des corps municipaux.

Conséquence rapide si l’on tient compte des délais d’acheminement des nouvelles à l’époque, le 14 février 1790, "le conseil politique de Caramaing, est convoqué en assemblée en la manière accoutumée3 et renforcé de la majeure  partie des habitants du dit lieu".

Les signaturesLa réunion est ouverte par les consuls qui présentent le décret spécifiant le nouveau mode de nouvelle organisation des corps municipaux. L’article 10 précise que l’on doit procéder à la nomination d’un président. Il faut donc en déduire que cette élection met fin au consulat puisque l’autorité des consuls n’est plus reconnue pour mener les débats. L’élection se passe par acclamation et c’est M  Montferrand, curé du dit lieu, qui est choisi comme président avec M. Chauvet4 comme secrétaire et Jean Pierre Denis, sieur Vaisse et sieur Valentin Malchinig comme scrutateurs. La fin de la délibération (voir illustration) nous permet de constater qu’ils savaient pratiquement tous écrire ; une incertitude demeure pour Jean Pierre  Denis qui 'est mentionné ni par une signature, ni par une croix.

Il est procédé ensuite à l’élection du corps municipal dont la composition est fixée par le décret. Il doit se composer d’un maire, de deux officiers municipaux, d’un procureur de la commune et de six notables. (Les termes de maire et d’officiers municipaux, ce sont les adjoints au maire actuels, sont nouveaux).

Le premier maire de Caramany sera donc…..François Bedos,  2ème consul en titre au début de la réunion.

Les officiers municipaux seront Jean Gély et Michel Delonca... arrivé à la réunion avec le titre de 1er consul.>

Le procureur sera sieur Vaisse, également sur la liste des consuls l’année précédente.

Les notables seront les sieurs Montferrand, curé, Chauvet, Jean Pierre Barrière et Jean Rolland eux aussi, portés sur la liste des candidats au consulat de 1789, Martin Calvet et Thomas Barilles.

Suivant l’article 48 du dit décret…"leur main levée à Dieu, ils ont promis et juré de maintenir de tout leur pouvoir la constitution du Royaume, d’être fidèles à la nation à la Loy et au Roy et de remplir leurs fonctions en gens de probité."

Le premier conseil municipal de Caramany était né.

Le passage de sujets du seigneur comte Savary de Mauléon Narbonne au rang de citoyens de la nouvelle nation française, qui nous semble à nous, avec le recul, être d’une importance capitale puisque progressivement, ce changement allait installer la république que nous connaissons, ne sembla pas avoir perturbé les Carmagnols du XVIII ème siècle. Ils ont tranquillement élu les notables qui les représentaient déjà, ce qui montre bien l' importance de ceux-ci dans la communauté et prouve que la révolution à Caramaing n’a pas été vécue comme un grand bouleversement.

Dire toutefois qu’elle se résume à un simple changement de vocabulaire serait réducteur, car au delà des conséquences politiques, il y a eu des conséquences économiques. Certaines familles, les Chauvet4 en sont le meilleur exemple,  ont profité de l’achat des terres du seigneur pour s’enrichir ; le bois de Baldherbe, le château ont été vendus aux habitants. Sans oublier (voir l’article volontaire ou réfractaire) l’obligation pour les nouveaux citoyens en 1792 de se battre pour défendre la patrie et de soutenir la république.

Notes:

  1. A Pibrac (31), cela correspond aux citoyens qui paient un impôt équivalent à trois journées de travail, c'est-à-dire 30 sous. (http://www.pibrac.com)
  2. Baile est l’écriture occitane. En catalan c’est le bayle et en français le bailli. C’est un administrateur, une sorte d’intendant des seigneurs.
  3. Par manière accoutumée, il faut comprendre au son de la cloche, expression rajoutée sur une délibération de 1789. Le lieu de réunion était en principe l’église et c’était le curé qui se chargeait des convocations. Cela nous indique aussi qu’en l’absence du clocher que nous connaissons, il y avait quand même une cloche à l’église.
  4. Le secrétaire greffier Grand n'a pas pensé à indiquer le prénom du sieur Chauvet. Or la famille était représentée à ce moment là par deux frères Jean Baptiste et Charles. C'est la signature de Jean Baptiste qui figure à la fin de l'acte. il est donc raisonnable de penser que c'est de lui qu'il s'agit. Si son frère avait été présent, il aurait certainement signé aussi, comme pour la réunion du 10 mai 1789.

Texte de la délibération, l’orthographe est respectée, les majuscules étaient mises, à l'époque, un peu au hasard.

" L’an mil sept cens quatre vingts neuf et le dixième jour du mois  de mai dans le lieu de caramaing par devant paul pujol premier consul en charge l’autre consul étant absent, ont été assemblés le s(ieur) charles chauvet procureur juridictionnel, les conseillers politiques et autres h(abit)ants soussignés ou marqués auxquels a été dis que le temps de changer de consuls étant arrivé, Il est duzage dans lad(ite) com(munauté),de présenter a M(onseigneurr le comte Savary de Mauléon seigneur du d(it) lieu six sujets électifs pour et par le d(it) seig(neur) en etre choisi deux pour remplir les charges de consuls de cette année a quoi prie de délibérer

Surquoy Il a ete unanimement délibérer de présenter aud(it) seig(neur) pour le premier Rang michel delonca, jean fontanel, et cyr vaisse et pour le second et dernier Rang françois bedos marquet, jean rolland et jean pierre barrière la liste desquels ayant été envoyé  au d(it) seigneur Il aurait choisi-----------------------------------------------------------------------

Lesquels la com(munauté) recevra pour consuls et lesquels seront tenus de prêter serment en tel cas requis par devant qui de droit et ils ont signés ou marqués."

Sources :

  • Archives communales