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L'église, lieu d'inhumation

 Une coutume du Moyen-Age:

En opposition complète avec l'interdit majeur qui, dans l'Antiquité, empêchait l'inhumation dans les cités, une coutume chrétienne va se développer au Moyen-Age, celle de se faire enterrer à l'ombre de la Croix. Les cimetières vont donc se déplacer au plus près de l’église et, afin que leur âme monte le plus vite possible au paradis, les croyants essaieront de placer leur tombe, autour de l'abside ou, ultime privilège, à l'intérieur même de l’édifice et là encore, toujours pour la même raison, le plus près possible du chœur.

Tout le monde ne pouvant être accueilli à l'intérieur, l’Église trouvera dans cette pratique une source de financement en établissant des règles qui favoriseront les personnes en capacité de faire des dons, c'est à dire celles qui sont le plus haut dans l'échelle sociale.

Seront donc en quelque sorte prioritaires les membres du clergé et les titulaires de seigneuries, c'est ce qui était courant dans les petites églises paroissiales, les riches familles bourgeoises trouvant aussi leurs places dans les grands édifices urbains.

La paroisse de Caramany a été concernée par cette coutume. Les registres conservés ne s'ouvrent que le 1er janvier 1655 à une période où la pratique avait tendance à décroître. La liste présentée ci-dessous ne comporte que 5 noms sur une période de 30 ans, mais gardons à l’esprit que le sous sol de notre église renferme certainement ou a renfermé1 d’autres dépouilles déposées au cours des deux siècle précédents.

acte de décès d'Anne de Roger

 A Caramaing:

- Le 17 janvier de l'an de Grâce 1692 décède dans la maison presbytérale, à l'âge d'environ septante ans, Monsieur Guillaume Lafille, curé du lieu de Caramaing depuis 1655. Ses obsèques seront célébrées par son confrère Jean Chaluleau, curé de Trilla qui va aussi devenir son successeur. Ce dernier précise que le défunt a été inhumé "en la seconde partie de la nef de l'église2", en présence de François Fauré et Pierre Fossat, les marguilliers3.*

- Le 30 juillet 1717, le curé Molinat atteste qu’il a enseveli, toujours "dans la deuxième partie de la nef2", noble Anne Roger, fille à Jean Roger, seigneur de Caramaing4 , morte le jour auparavant, âgée de deux ans.

- Lors de son décès, Charles Fabre, pourtant curé de longues année ne semble pas avoir bénéficié d’attentions particulières, puisque aucune présence de clerc des environs n'est mentionnée, pas plus qu'une croix dessinée dans la marge, ce qui se fait parfois, ne met en évidence son acte sur le registre. Le recteur Cuguillère, à ce moment là en fonction, mentionne juste sa qualité d’ancien curé, son âge de 83 ans, un âge très avancé qui explique peut-être qu' on l'a un peu oublié, et son inhumation le 7 décembre 1735, dans l'église, sans plus de précision.

acte de décès du curé Guilhaume Lafille

- C'est ce même recteur, Maître Pierre Cuguillère, qui sera enseveli dans l'église le 11 janvier 1763. La cérémonie est assurée par Antoine Cuguillère, qui signe prêtre et vicaire en chef. C'est très certainement un parent ; font fonction de témoins Pierre Jaubail et Jean-Baptiste Chauvet, notables du village5.

- Le 10 octobre 1770 est inhumé Pierre Alquier, 23 ans, fils de Joseph et Anne Alquier du Vivier. C'est sa qualité de clerc tonsuré qui lui donne cette faveur. Le cléricat est le passage obligé vers l'ordination. Le fait de recevoir la tonsure conduit vers la réception des ordres mineurs (portier, lecteur, exorciste et acolyte) puis majeurs (sous- diaconat, diaconat, prêtrise). Pierre Alquier faisait donc ses classes, pour employer un terme moderne, auprès du curé Antoine Cuguillère. Sont présents, comme en attestent leurs signatures un autre membre de la famille Cuguillère prénommé Bertrand et un certain Jeli. (Geli)

- Maître Antoine Cuguillère termine à 55 ans la liste des curé décédés avant la Révolution. Son acte est daté du 28 juin 1785. Est mentionnée la date de ses obsèques le 29 juin, mais pas le lieu de son inhumation. Peut-être doit on considérer comme une évidence que c'était l'église ? En tout cas, il a été bien accompagné puisqu'on note la présence de Mrs Bernard Serres, curé de Latour, Jean Roch Azéma, curé de Bélesta, Jean Pagès, curé de Cassagnes, Guillaume Clément Raymond, curé d'Ansignan et Jean Chamayou, curé de Montalba qui officie.

Il faut noter que Jean Chaluleau, curé de 1692 à 1699, se distingue de ses confrères6. Il est, lui, enterré "au pied de la croix du milieu du cimetière". Faut-il y voir un signe d'humilité ou la volonté de rester auprès de ses fidèles, tout en bénéficiant de la protection divine ?

Notes:

  1.  Depuis sa construction estimée autour de l'année 1400, il est fort probable que le sol de l'église a été remanié à plusieurs reprises faisant apparaître ou disparaître des sépultures. Difficile de croire que les "grands travaux" de 1885-1886, n'aient pas mis au jour certains restes ; ce fut peut-être aussi le cas lorsque le béton qui sert actuellement de pavage a été soigneusement coulé. En tout cas, à ce jour aucun document d'origine paroissiale ou municipale ne mentionne une découverte quelconque.
  2.  Tout en apportant une information très intéressante, les inhumations se font dans la nef, ce détail introduit un nouveau mystère : les curés successifs considèrent qu'il y a deux parties de la nef. Faut-il en déduire qu’un agrandissement de l'église primitive a eu lieu entre 1400 et 1655 et que l'on a pris l’habitude d'employer première partie pour la partie ancienne et deuxième partie pour la partie nouvelle ?
  3.  Les marguilliers étaient des laïcs, membres du Conseil de Fabrique et, à ce titre, chargés pour un an de l'entretien et de la garde de l'église.
  4.  Voir le texte « De 1716 à 1730, les seigneurs résident au château ». rubrique Histoire.
  5.  Jean-Baptiste Chauvet est le fils et héritier d'Etienne, maître chirurgien du village. Il est pour sa part commerçant. Il participera activement à la Révolution, en étant élu député de la paroisse pour la rédaction du cahier de doléances, puis deviendra membre du conseil général de la commune en qualité de notable (c'étaient les termes employés à ce moment-là) et enfin membre du premier conseil général du département, représentant du canton de Latour de France. Pierre Jaubail est receveur des fermes du roy en résidence à Caramany. Il n'est présent dans les registres que comme témoin des cérémonies pendant une paire d'années . Il n'est donc pas originaire de Caramany et est simplement venu occuper son poste ; (voir l'article « Une brigade des douanes à Caramany », publié en 2013)
  6.  Voir le texte « Les actes singuliers du curé Chaluleau», rubrique Anecdotes

Sources:

  • registres paroissiaux - Archives départementales des PO

Phptos:

miniature: la nef de l'église Saint Etienne- Philippe Garcelon

1: acte de dès de noble Anne (de) Roger 

2: acte de décès du curé Guilhaume Lafille