Nous vous recommandons quelques sites voisins.

Visitez-les !

Nouveauté sur le site :

Galerie de photos

Chasse aux sorcières

AthenaDans la mythologie  grecque, la chevêche (athéna nochéa) était un attribut des devins. Oiseau sacré de la Déesse Athéna, son image symbolisait sagesse, intelligence et science (au sens de savoir). Elle devint à ce point emblématique, que la Ville d’Athènes l’adopta  et  en fit l’effigie de sa monnaie, la drachme (image ci-contre). L’hellène Athéna se transforma en Minerve, chez les Romains. Déesse de la connaissance, elle voyait ses pouvoirs étendus aux arbres, aux arts et à la guerre. Avec son père Jupiter (dieu du ciel) et Junon (reine des dieux et du ciel), elle forme la « triade romaine » qui fit l’objet d’un culte dés le VIème siècle avant Jésus-Christ. Alors que chez les Grecs la chouette était un animal de bonne augure, elle devint chez les Romains, annonciatrice de mauvais présages. A Rome, les offrandes aux divinités païennes étaient essentiellement constituées de sacrifices d’animaux.

Outre les bœufs et les moutons, destinés aux sacrifices lors des cérémonies présidées par les grands prêtres, la volaille, et particulièrement les coqs, arrivaient en bonne place, parmi les animaux sacrificiels à usage domestique. Ainsi le romain sacrifiait sous son propre toit; l’effusion de sang, sensée être agréable au regard des divinités, permettait d’attirer leurs faveurs pour protéger sa demeure. A la fin du IVème siècle de notre ère,  l’empereur Théodose interdit la pratique de tous les anciens cultes; le christianisme devint alors religion officielle. Les divinités païennes furent effectivement délaissées, sans pour autant que ne disparaissent les croyances qui leur étaient rattachées et qui restèrent enracinées dans les esprits. Evoluant par transmission orale elles se sont modifiées au fil des siècles en se mêlant avec des croyances et superstitions antérieures à l’occupation romaine et la christianisation progressive qui s’en suivit. C’est ainsi qu’aujourd’hui elles nous sont parvenues, et que leurs réminiscences, peuvent nous apparaitre au gré de nos déambulations dans les rues de Caramany.

portat xotPour conjurer les malédictions, les propriétaires de certaines maisons, qui ont probablement gardé en eux la trace des antiques croyances que nous venons d’évoquer, firent apposer sur les bords des toitures, des attributs nommés « espanta bruixe », « cue de gall », « portat  xot », signifiant respectivement « effraie sorcière »,  « queue de coq » ou « perchoir à chouette ».

Ces petits éléments architecturaux, constitués d’un simple morceau de tuile relevé sont destinés à protéger les habitants des mauvais esprits et à assurer leur prospérité. Suivant les régions les formes ou les fonctions de ces sortes d’appendices diffèrent légèrement.

A Caramany on en trouve, trois variantes: La première image montre le « portat xot » traditionnelle, majoritaire en Conflent, elle sert de perchoir à la chouette qui selon la tradition était l’animal dans lequel s’incarnait la sorcière. Ainsi la chouette/sorcière qui se posait sur ce « perchoir » ne jetait pas de mauvais sort sur la maison qui lui offrait le repos.

Queue de coqLa seconde image illustre la variante « cue de gall »  formée d’une tuile plus large qui a été striée pour symboliser les plumes de la queue (ou la crête) d’un coq, animal dont les vertus protectrices ont traversé les époques. Au loin le clocher, lui aussi surmonté d'un coq, suscite un commentaire: En effet, dès le moyen âge, le coq selon la croyance populaire mettait fin au chant des sorcières en annonçant la venue du jour.

On notera que la religion chrétienne a également puisé dans les cultes païens, une partie de son bestiaire.

Rien d’étonnant donc de retrouver un coq flanqué au sommet du clocher de Caramany. A cette différence près, que le coq de la religion chrétienne symbolise la résurrection ou le prédicateur qui réveille ceux dont la foi s’est endormie.

Fleur de lysEnfin une dernière variante de ces « espanta bruixes », que l’on trouve essentiellement en Roussillon est constituée d’un fragment de tuile incurvé symbolisant la fleur de lys, aux vertus purificatrices. (Le lys est présent dans la bible en tant que symbole de Virginité et de Pureté). Ainsi, même le plus anodin des détails de notre patrimoine architectural, peut porter en lui bien plus qu’il n’y parait. Passant souvent inaperçu, il constitue parmi la multitude des éléments qu’il reste encore à décrypter, un témoignage original des hommes qui contribuèrent à l’identité du village.

Photos: Philippe Garcelon.