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Un Carmagnol s'illustre dans les affaires

Vers le milieu du XIXème siècle, le commerce de détail connait une extraordinaire mutation grâce à l’apparition de ce que l’on nomme encore aujourd’hui « grand magasin ».

C’est à cette époque que naissent en France des enseignes prestigieuses comme le Printemps, le Bon Marché ou la Samaritaine. Ces magasins étaient révolutionnaires dans leur fonctionnement : le client y disposait enfin d'un accès libre, le prix des marchandises ne se faisait plus « à la tête du client » mais était clairement affiché et généralement moins cher que dans les petits commerces (l’accroissement du volume venant compenser la réduction des marges), la notion de conseil apparaissait et les premiers services après-vente se mettaient en place.

Qui se serait douté alors qu’un Carmagnol allait innover en ce domaine pour devenir un des illustres contributeurs de cette nouvelle forme de distribution, véritable vitrine de la mutation économique et urbaine caractérisant la fin de ce XIXème siècle et dont la formule subsiste encore après plus d’un siècle d’existence par des enseignes devenues emblématiques comme les Galeries Lafayette ou le BHV.

Un article paru en 1910 dans l’ouvrage « nos Lyonnais d’hier » sous la plume de l’abbé Adolphe Vachet nous éclaire.

Jean Tresseres

On pourra trouver sur le lien ci-dessous, le « Bulletin officiel de l’Exposition de Lyon » de 1894,  dans lequel apparait le nom de Jean Tresserre dans la liste du « Jury International des récompenses» groupe V classe 19 (Tissus, vêtements et accessoires).

lien: http://collections.bm-lyon.fr/

En prolongeant mes recherches sur Jean Tresserre, j’ai trouvé une thèse de doctorat « Grand bazar, mode d’emploi » rédigée par Anne-Sophie Beau (Université Lumière à Lyon. UFR d’histoire). Ce document dresse un tableau de la vie économique et sociale au sein d'un grand magasin. Il fait, entre autre, apparaitre les circonstances dans lesquelles le « Grand Bazar » lyonnais a ouvert ses portes en 1886, suite à un affrontement commercial.

lien: http://theses.univ-lyon2.fr/documents/getpart.php?id=315&action=pdf

On peut y lire: « La rue Impériale  (qui deviendra rue de la République) est l’axe central des travaux d’Haussmannisation de la ville de Lyon… C’est là, au N°31, que Jean Dabonneau installe son magasin de nouveautés « A la Ville de Lyon » en 1856. Quelques centaines de mètres plus loin ; Henry Perrot profite lui aussi de la restructuration urbaine pour agrandir son magasin de tissus… Ce dernier devient les Deux Passages. La concurrence que se livrent les deux magasins de nouveautés tourne à l’avantage du second:  A La Ville de Lyon doit déménager... avant de faire faillite en 1892. L’architecture du bâtiment libéré rue de la République est, par excellence, celle d’un grand commerce : aucun mur ne vient diviser le rez-de-chaussée, parsemé régulièrement de piliers qui soutiennent les deux étages supérieurs. Le premier est une grande galerie circulaire, l’espace central étant ouvert sur le rez de chaussée. Le Crédit Lyonnais, propriétaire des lieux, propose alors à Henri Perrot (celui qui a fait chuter A La Ville de Lyon ) d’y ouvrir un magasin ».

grand bazarC’est dans ce contexte que le Carmagnol Jean Tresserre qui se trouve être le cousin d’Henri Perrot, fait son entrée dans le monde des affaires lyonnais. Avec ce dernier et un de ses frères, Jean Tresserre fonde une association qui prendra la forme d’une société anonyme dont les statuts seront déposés chez le notaire le 28 juin 1886. Anne-Sophie Beau écrit à ce sujet: « Ils s’adjoignent les services de Paul Kahn, membre du conseil d’administration des Galeries Lafayette… et Benoit Arnaud, imprimeur, pour former le conseil d’administration de la société dont Henri Perrot prend la présidence. Le 8 novembre 1886, un nouveau magasin ouvre ses portes, le Grand Bazar est né... Le conseil d’administration de la société « Le Grand Bazar de Lyon » joue un rôle central dans la marche des affaires, exerçant un contrôle constant sur les directeurs du magasin puis en prenant directement les commandes ».

Sous la présidence de Jean Tresserre, la société innove et met en place sa propre caisse de retraite : « Préparés par un homme de loi, les statuts de la caisse du Grand Bazar sont prêts en 1894. Ils rappellent que cette caisse ne sera alimentée par aucune retenue sur les salaires ou appointements du personnel, mais uniquement par les dons qui pourront lui être faits et les sommes que le conseil d’administration voudra bien prélever sur les 20% de bénéfices à sa disposition… »

Aujourd’hui, le bâtiment du 31 rue de la République abrite un magasin Monoprix, enseigne filiale du groupe Galeries Lafayette, au sein duquel j’ai travaillé durant une trentaine d’années. Je me rendais fréquemment à Lyon où se trouvait ma direction régionale et j’ai eu maintes fois  l’occasion de fouler le trottoir du « Grand Bazar », sans me douter aucunement qu’un jour, je découvrirai qu’un Carmagnol avait présidé, en ces lieux, à la destinée d'une grande entreprise commerciale novatrice.